Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 novembre 2017, Mme D...A..., représentée par Me C...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa demande, dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, à titre subsidiaire, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la même somme à son profit sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal sur la circulation et le séjour des personnes ;
- l'accord du 23 septembre 2006 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relatif à la gestion concertée des flux migratoires et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Charles-Edouard Minet, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur la légalité externe de l'arrêté en litige :
1. L'arrêté du préfet de l'Eure du 22 décembre 2016 énonce, pour chacune des décisions qu'il contient, les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde. Il est dès lors suffisamment motivé.
Sur la légalité interne de la décision de refus de titre de séjour :
2. Saisi par Mme A...d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salariée, le préfet de l'Eure a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur ce fondement et s'est également prononcé sur le droit au séjour de l'intéressée au titre de la vie privée et familiale.
En ce qui concerne le refus d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salariée :
3. Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants sénégalais, s'appliquent les stipulations de la convention du 1er août 1995 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal relative à la circulation et au séjour des personnes ainsi que celles de l'accord du 23 septembre 2006 relatif à la gestion concertée des flux migratoires, telles que modifiées par un avenant signé le 25 février 2008.
4. Aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : / - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ".
5. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, inséré au sein d'une septième sous-section intitulée " l'admission exceptionnelle au séjour " de la deuxième section du chapitre III du titre Ier du livre III de la partie législative de ce code, dispose, en son premier alinéa, que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".
6. Les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 du code.
7. Il ressort des pièces du dossier que MmeA..., de nationalité sénégalaise, a effectué des missions d'intérim avant d'être employée par le département de l'Eure en qualité d'agent public non titulaire à compter de l'année 2014 et jusqu'en octobre 2016. Toutefois, il n'est pas établi que l'intéressée, qui était employée en qualité " d'agent d'entretien polyvalent ", exerçait l'un des métiers mentionné à l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006. En outre, il est constant qu'à la date de la décision attaquée, elle ne disposait pas d'une proposition de contrat de travail. Enfin, et en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels que Mme A...aurait fait valoir justifiaient son admission exceptionnelle au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, en rejetant la demande présentée sur ce fondement par la requérante, le préfet de l'Eure n'a pas méconnu les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 ni commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne le refus d'admission au séjour au titre de la vie privée et familiale :
8. Mme A...déclare, sans l'établir, être entrée en France au mois de mai 2013. A compter du mois de janvier 2014, elle a été munie d'une autorisation provisoire de séjour au titre de son état de santé. Par un arrêté du 23 septembre 2014, dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif de Rouen, le préfet de l'Eure a toutefois refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Mme A...s'est maintenue sur le territoire national et a présenté une nouvelle demande de titre de séjour le 14 octobre 2016. Il ressort des pièces du dossier que la requérante, qui a donné naissance, sur le territoire français, à deux enfants nés sans vie, est sans charge de famille. Si elle se prévaut de sa relation avec un ressortissant togolais qui était titulaire, à la date de l'arrêté attaqué, d'une carte de séjour temporaire, cette relation présente, à cette même date, un caractère récent. Il n'est pas démontré, en tout état de cause, que Mme A...et son conjoint ne pourraient pas vivre ensemble hors de France et notamment au Sénégal ou au Togo. Enfin, il ressort des pièces du dossier que MmeA..., qui n'établit pas qu'elle aurait quitté le Sénégal dès l'année 2008, n'est en tout état de cause pas isolée dans son pays d'origine où vivent notamment ses parents. Dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions du séjour de Mme A...sur le territoire français, la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise. Elle n'a donc méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes raisons, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en rejetant la demande de titre de séjour de MmeA..., le préfet de l'Eure aurait fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.
9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 8 que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.
En ce qui concerne la légalité interne de l'obligation de quitter le territoire français :
10. Il résulte de ce qui a été dit au point 9 que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français reposerait sur une décision de refus de titre de séjour elle-même illégale.
11. Pour les motifs énoncés au point 8, l'obligation faite à Mme A...de quitter le territoire français n'apparaît pas contraire aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de l'Eure aurait fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.
12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 1, 10 et 11 que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
13. Il résulte de ce qui a été dit au point 12 que Mme A...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination de son éloignement est entachée d'illégalité.
14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A..., au ministre de l'intérieur et à Me C...B....
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.
N°17DA02147 2