Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 mai 2019, la commune d'Octeville-sur-Mer, représentée par Me A... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'avis du 8 février 2017 du conseil de discipline de recours ;
3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public ;
- et les observations de Me C... pour la commune d'Octeville-sur-Mer et de Me E... F... pour Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme G... B... est éducatrice principale de jeunes enfants et exerçait les fonctions de directrice de la garderie municipale d'Octeville-sur-Mer. Le 26 août 2014, alors que Mme B... était en congé de maladie, le maire d'Octeville faisait constater par huissier l'existence de deux coffres à la halte-garderie contenant 767,12 euros et d'une comptabilité manuscrite. Mme B... a été condamnée pénalement par jugement du tribunal correctionnel du Havre du 9 août 2016, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Rouen du 4 octobre 2017, à une amende de 1 000 euros avec sursis de 500 euros. Parallèlement, la commune a entrepris une procédure disciplinaire. Le maire, par arrêté du 21 novembre 2016 a révoqué Mme B... qui a saisi le conseil de discipline de recours. Ce conseil, le 8 février 2017, a donné un avis favorable à une exclusion temporaire de fonctions d'un mois dont quinze jours avec sursis. La commune d'Octeville-sur-Mer relève appel du jugement du 26 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de cet avis.
2. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.
3. L'autorité de chose jugée appartenant aux décisions des juges répressifs devenues définitives qui s'impose aux juridictions administratives, s'attache à la constatation matérielle des faits mentionnés dans le jugement et qui sont le support nécessaire du dispositif, et même lorsque le jugement pénal définitif est postérieur à la décision en litige devant la juridiction administrative.
4. En l'espèce, la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Rouen dans son arrêt du 23 novembre 2017 retient que Mme B... a perçu en tant que fonctionnaire territoriale exerçant les fonctions de directrice de la halte-garderie des recettes auprès des parents en contrepartie de prestations non obligatoires fournies par la halte-garderie, sans que ces recettes aient été autorisées par la commune, ni a fortiori que l'intéressée n'ait été autorisée à les percevoir. L'arrêt de la cour d'appel confirme le constat des faits retenus par le tribunal correctionnel du Havre dans son jugement du 9 août 2016, qui a condamné Mme B... à une amende de 1 000 euros dont 500 avec sursis.
5. L'avis du conseil de discipline de recours du 8 février 2017 a considéré que la méconnaissance des règles de la comptabilité publique par Mme B... qui avait encaissé des recettes hors régie, constituaient " un manquement à ses obligations d'agent public, justifiant l'adoption d'une sanction à son encontre ". Il a donc pris en compte les faits ainsi constatés par le juge pénal pour l'établissement des faits fautifs retenus à l'encontre de Mme B.... Le conseil de discipline de recours a toutefois également indiqué dans son avis que cette pratique était connue de la commune. Or, l'arrêt de la cour d'appel de Rouen juge que, si la pratique avait un caractère notoire pour les usagers et les personnels de la halte-garderie, rien ne permet d'établir que l'autorité municipale ait eu connaissance de cette pratique. Ce constat du juge pénal, même postérieur s'impose à la juridiction administrative.
6. Toutefois, le conseil de discipline de recours a également relevé que " les recettes perçues auprès des parents ont été utilisées dans l'intérêt des enfants ", alors que le juge pénal n'a lui pas relevé de détournement de fonds. Par suite, le conseil de discipline de recours qui a qualifié la faute de Mme B... de grave mais qui a limité la sanction proposée à une exclusion temporaire d'un mois dont quinze jours avec sursis aurait pris le même avis s'il avait repris l'ensemble des constatations de fait établies par le juge pénal. Le moyen tiré de l'erreur de fait ne peut donc qu'être écarté.
7. S'agissant de la proportionnalité de la sanction, il ressort de l'ensemble des pièces du dossier que Mme B... n'a pas entendu dissimuler sa pratique et la cour d'appel mentionne d'ailleurs le caractère " notoire des prestations ou des paiements litigieux ". Le règlement intérieur élaboré par Mme B... qui en faisait état, était affiché dans les locaux. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que les évaluations professionnelles de Mme B... sont élogieuses. L'intéressée produit également de très nombreuses attestations de parents mais aussi de personnels de la structure qu'elle dirigeait, témoignant de la réputation de celle-ci et, de l'attention portée aux enfants. Compte tenu de ces éléments et ainsi qu'il a été dit du fait que les recettes étaient utilisées dans l'intérêt des enfants, la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'un mois dont quinze jours avec sursis, n'apparaît pas disproportionnée. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation ne peut donc qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Octeville-sur-Mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme B... au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Octeville-sur-Mer est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié à Me A... D... pour la commune d'Octeville-sur-Mer et à Me E... F... pour Mme G... B....
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N°19DA01084
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