Elle soutient que :
- le traitement dont l'intimée a besoin est effectivement disponible en République démocratique du Congo ;
- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;
- l'intimée n'a jamais allégué être dans l'impossibilité de voyager sans risque vers son pays ;
- les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2016, MmeB..., représentée par Me Martine Mari, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que les moyens soulevés par la préfète de la Seine-Maritime ne sont pas fondés.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 novembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;
2. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
3. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d 'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
4. Considérant que, par un avis rendu le 19 février 2016, le médecin de l'agence régionale de santé de Normandie a estimé que l'état de santé de MmeB..., ressortissante de la République démocratique du Congo, nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas dans ce pays de traitement approprié à cet état de santé ; que la préfète de la Seine-Maritime, qui n'était pas liée par cet avis, a toutefois refusé de délivrer le titre de séjour demandé au motif de l'existence d'un traitement approprié dans ce pays ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que Mme B...souffre de troubles psychiatriques nécessitant un traitement médical ; que la préfète de la Seine-Maritime, en cause d'appel, admet que les molécules nécessaires au traitement de l'intimée ne figurent pas dans la liste des médicaments essentiels de ce pays, révisée en mars 2010, mais indique que sont disponibles plusieurs molécules prescrites pour traiter les troubles psychotiques, la dépression, les troubles de l'humeur, du sommeil et le désordre panique, pathologies dont souffre la requérante ; que cette affirmation ne permet cependant pas d'établir la disponibilité en République démocratique du Congo du traitement spécifique dont Mme B...a besoin, constitué par l'administration de Lormetazepam, d'Oxazepam, d'Escialopram, d'Hydroxyzine dichlorhydrate et d'Alzaprazolam, ni que les molécules qui y seraient disponibles pourraient se substituer audit traitement ; que c'est par suite à bon droit que les premiers juges ont estimé que la préfète de la Seine-Maritime avait, en prenant l'arrêté contesté, méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la préfète de la Seine-Maritime n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 18 avril 2016 ;
7. Considérant que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Martine Mari, avocat de Mme B...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier le versement à Me Martine Mari de la somme de 900 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la préfète de la Seine-Maritime est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Me Martine Mari une somme de 900 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., au ministre de l'intérieur et à Me Martine Mari.
Copie en sera adressée à la préfète de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 1er décembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Nizet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 15 décembre 2016.
Le rapporteur,
Signé : J.-J. GAUTHÉ Le président de
La formation de jugement,
Signé : O. NIZET Le greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Isabelle Genot
1
2
N°16DA01575
1
8
N°"Numéro"