Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 12 juillet 2016, Mme A...B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 juin 2016 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du préfet de l'Isère du 15 février 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer dans le délai d'un mois un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou de réexaminer sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... d'une somme de 1 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- il n'est pas justifié de la compétence de l'auteur de l'acte ;
- l'arrêté critiqué est insuffisamment motivé ;
- le refus de lui délivrer un titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire lui a été illégalement opposée sans examen de sa situation personnelle ;
- l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale à raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit de mémoire.
Mme A... B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 18 août 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
1. Considérant que MmeB..., ressortissante de la République démocratique du Congo née en 1986, est entrée au mois de mai 2014 en France, où sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 14 février 2015 confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 23 juillet 2015 ; que, par arrêté du 15 février 2016, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour fondée sur son état de santé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et à désigné le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office à l'expiration de ce délai ; que Mme B... relève appel du jugement du 30 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions préfectorales du 15 février 2016 ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de l'Isère :
2. Considérant que, par un arrêté du 27 août 2015 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 50, le préfet de l'Isère a donné délégation à Mme Coste de Champeron, secrétaire générale adjointe, à l'effet de signer les refus de titres de séjour et les mesures d'éloignement ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté ; qu'il y a également lieu d'écarter le moyen tiré du défaut de motivation de cet arrêté par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;
4. Considérant que, pour refuser de délivrer à Mme B...un titre de séjour pour raison de santé, le préfet de l'Isère s'est fondé sur la circonstance que l'état de santé de l'intéressée pouvait faire l'objet d'une prise en charge appropriée dans son pays d'origine ; que, ce faisant, le préfet de l'Isère n'a pas fait sien l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 23 octobre 2015 selon lequel les soins requis par l'état de santé de Mme B...ne pouvaient lui être prodigués en République démocratique du Congo ; que le préfet de l'Isère, qui n'était pas lié par l'avis du 23 octobre 2015, a fait état devant le tribunal administratif des éléments relatifs à l'offre médicale et hospitalière en République démocratique du Congo sur lesquels il s'est fondé et a produit en particulier le message du 5 septembre 2013 du médecin référent de l'Ambassade de France à Kinshasa relatif à la prise en charge des affections psychiatriques dans ce pays, permettant de considérer que ses institutions sont en situation d'assurer de façon appropriée le suivi de la pathologie dont souffre MmeB... ; que les circonstances dont fait état la requérante, qui a produit notamment des certificats du 15 mars 2016 attestant du suivi dont elle fait l'objet en France, ne suffisent pas pour considérer qu'aucun traitement approprié à son état de santé ne serait disponible dans son pays d'origine, contrairement à ce qu'a retenu l'autorité préfectorale, ; que, dans ces conditions, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté ses moyens selon lesquels la préfet de l'Isère aurait entaché sa décision d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
5. Considérant qu'au soutien de sa contestation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 15 février 2016 en ce qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français, Mme B...réitère, sans les assortir d'éléments nouveaux, ses moyens de première instance tirés de l'erreur de droit commise par l'autorité administrative faute d'avoir procédé à un examen particulier de sa situation avant de prononcer son éloignement, de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée cette mesure au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à se prévaloir, à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi, de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire ;
7. Considérant que, pour contester la décision fixant la République démocratique du Congo comme pays de renvoi, Mme B...invoque la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en faisant valoir, dans les mêmes termes que devant le tribunal administratif, qu'elle a été inquiétée et a subi des violences à raison des activités de son conjoint ; qu'alors que la demande d'asile de Mme B...a été rejetée, les éléments qu'avance la requérante ne suffisent pas, comme l'ont retenu les premiers juges, à établir la réalité et l'actualité des risques auxquels elle soutient être personnellement exposée en cas de retour dans son pays ; que le moyen doit, par suite, être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 15 février 2016 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Considérant que le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 15 février 2016, n'implique aucune mesure d'exécution ;
Sur les frais d'instance :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre l'Etat qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2017, à laquelle siégeaient :
M. Yves Boucher, président de chambre ;
M. Antoine Gille, président-assesseur ;
Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 mars 2017.
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N° 16LY02369
mg