3°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 1600507 du 27 juillet 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 16 novembre 2016 et le 16 avril 2018, M.B..., représenté par Me Guérault, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 juillet 2016 ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du préfet du Rhône du 29 octobre 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt jusqu'au réexamen de sa demande, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 300 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le préfet du Rhône a commis une erreur de droit en ne procédant pas à un examen global de sa situation, et notamment en n'examinant pas la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine ;
- le préfet a ajouté à la loi une condition qui n'y figure pas ;
- la preuve de l'absence de lien avec la famille restée dans le pays d'origine est impossible à rapporter ;
- c'est à tort que le préfet du Rhône a considéré qu'il ne remplissait pas les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français ont été pris en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procèdent d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leurs conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 avril 2018, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge de M. B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 octobre 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère, au cours de l'audience publique ;
1. Considérant que M.B..., ressortissant bangladais né le 5 août 1997, est entré irrégulièrement en France le 16 décembre 2013, selon ses déclarations, et qu'en raison de sa minorité, il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance ; que M. B... relève appel du jugement du 27 juillet 2016 du tribunal administratif de Lyon ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 29 octobre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours à destination de son pays d'origine ou de tout pays où il serait légalement admissible ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction applicable à la date du refus de titre de séjour en litige : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. " ;
3. Considérant que, lorsqu'il examine une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle ; que, disposant d'un large pouvoir d'appréciation, il doit ensuite prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française ; qu'il appartient seulement au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a portée ;
4. Considérant que, pour refuser de délivrer un titre de séjour à M.B..., sur le fondement des dispositions précitées, le préfet du Rhône, après avoir relevé que l'intéressé avait été confié à l'aide sociale à l'enfance à l'âge de seize ans et cinq mois, a rejeté sa demande aux motifs, d'une part, qu'il était célibataire, sans charge de famille, entré récemment en France et qu'il n'était pas isolé au Bengladesh, où résident ses parents et, d'autre part, qu'il ne justifiait pas qu'il serait dans l'impossibilité, devenu majeur, de créer dans son pays d'origine sa propre vie privée et familiale et de mettre à profit la formation professionnelle débutée en France ; qu'en se fondant sur ces motifs, sans avoir procédé à un examen global de la situation de M. B...au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française, le préfet a commis une erreur de droit ; que M. B...est par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, fondé à demander l'annulation de la décision du 29 octobre 2015 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, ainsi que, par voie de conséquence, des décisions du même jour par lesquelles le préfet l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé un pays de destination ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
6. Considérant qu'eu égard aux motifs qui la fondent, l'exécution de l'annulation prononcée n'implique pas que le préfet du Rhône délivre à M. B...une carte de séjour temporaire ; que le présent arrêt implique seulement que le préfet du Rhône procède au réexamen de sa demande de titre de séjour dans un délai de deux mois ; qu'il y a également lieu, en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'enjoindre au préfet du Rhône de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. B... dans un délai d'un mois ;
Sur les frais liés au litige :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me Guérault, avocat de M.B..., au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Guérault renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.B..., qui n'est pas partie perdante, la somme que demande le préfet du Rhône au titre des frais non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les décisions du 29 octobre 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par M.B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé un pays de destination ainsi que le jugement 1600507 du tribunal administratif de Lyon en date du 27 juillet 2016 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. B... dans un délai d'un mois et de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Guérault, conseil de M.B..., une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Guérault renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 24 avril 2018, à laquelle siégeaient :
M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
M. Hervé Drouet, président-assesseur,
Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.
Lu en audience publique, le 15 mai 2018.
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N° 16LY03786
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