Procédure devant la Cour
Par une requête, enregistrée 30 juillet 2015, M. A... B..., représenté par Me Meziane, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1501040 du tribunal administratif de Lyon du 18juin2015 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 19 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui accorder une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- les juges de première instance ont omis de répondre au moyen de l'erreur de droit tirée de ce que le préfet s'est fondé à tort sur l'absence de visa de long séjour et de contrat de travail visé par l'autorité compétente ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- le préfet a considéré à tort que sa demande de titre de séjour était présentée sur le fondement de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
- en s'estimant à tort lié par la décision de refus d'autorisation de travail, le préfet a renoncé à son pouvoir discrétionnaire de régularisation ;
- le préfet a commis une erreur de fait sur la durée de sa présence en France, dès lors qu'il y a sa résidence habituelle depuis mars 2000 ;
- la décision en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article L. 313-14 du même code et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il a depuis mars 2000 sa résidence habituelle en France où il vit auprès de seize des membres de sa famille - frères, oncles, cousins - dont cinq ont la nationalité française et un la nationalité belge, les autres étant résidents réguliers en France, qu'il a bénéficié d'un récépissé de demande de titre de séjour avec autorisation de travailler et qu'il maîtrise parfaitement la langue française ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi :
- elles sont entachées de défaut de motivation ;
- elles sont illégales du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elles sont illégales par les mêmes moyens que ceux présentés à l'encontre du refus de titre de séjour ;
- elles méconnaissent la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008.
Un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2017 et présenté par le préfet du Rhône, n'a pas été communiqué en application de l'article R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié relatif au séjour et au travail des personnes ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Hervé Drouet, président-assesseur,
- et les observations de Me Meziane, avocate, pour M. B... ;
Sur le refus de titre de séjour :
1. Considérant, en premier lieu, que dans son mémoire introductif d'instance, M. B... a soulevé les moyens tirés de ce que le préfet avait commis une erreur de droit par méconnaissance des articles 7 quater et 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, L. 313-11, 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'étendue de ses pouvoirs et de la règle de l'examen particulier de sa situation ; qu'il résulte des points 2 à 7 du jugement attaqué que les juges de première instance, qui n'étaient pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par M. B..., ont expressément et suffisamment répondu à ces moyens ;
2. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... ;
3. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des termes de la décision en litige, que le préfet a, comme le soutient le requérant, considéré que sa demande de titre de séjour était présentée sur le fondement de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
4. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas des motifs de la décision en litige, que le préfet se serait estimé lié, pour rejeter la demande de titre de séjour de M. B..., par sa décision du 2 octobre 2014 rejetant sa demande d'autorisation de travail ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces produites tant en première instance qu'en appel par M. B... que celui-ci ait, à la date de la décision en litige, résidé de manière habituelle en France depuis plus de dix ans ; que, par suite, n'est pas entaché d'erreur de fait le motif de la décision contesté tiré de ce que l'intéressé ne justifie pas de sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans ;
6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié relatif au séjour et au travail des personnes : " (...) les ressortissants tunisiens bénéficient dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale"." ; que selon le premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ;
7. Considérant que M. B..., né le 25 septembre 1981 et de nationalité tunisienne, soutient qu'il a depuis mars 2000 sa résidence habituelle en France où il vit auprès de seize des membres de sa famille - frères, oncles, cousins - dont cinq ont la nationalité française et un la nationalité belge, les autres étant résidents réguliers en France, qu'il a bénéficié d'un récépissé de demande de titre de séjour avec autorisation de travailler et qu'il maîtrise parfaitement la langue française ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point précédent, il ne justifie pas de sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans ; que, célibataire et sans charge de famille, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où vivent ses parents, trois autres frères et une de ses soeurs ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée de refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et familiale du requérant ; que, pour les mêmes motifs, le préfet, qui a également examiné la demande de titre de séjour de M. B... sur le fondement des dispositions précitées du premier alinéa de l'article L. 313-14 du même code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas davantage commis, au regard de ces dispositions, d'erreur manifeste d'appréciation de la situation du requérant qui n'établit pas l'existence de considérations humanitaires ni de motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :
8. Considérant, en premier lieu, que les deux décisions contestées énoncent les considérations de droit et les éléments de fait propres à la situation personnelle de l'intéressé qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation de ces deux décisions doit être écarté ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 7 que M. B... n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi, de l'illégalité de la décision rejetant sa demande de titre de séjour ;
10. Considérant, en troisième lieu, que le requérant reprend les mêmes moyens que ceux soulevés à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour ; que, pour les motifs exposés dans le cadre de l'examen de la légalité de cette décision, ces moyens ne peuvent qu'être écartés ;
11. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 doit être écarté comme dépourvu de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et de mise à mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 7 février 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
- M. Hervé Drouet, président-assesseur,
- M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 février 2017.
6
N° 15LY02702
lt