Procédure devant la our
Par une requête, enregistrée 3 août 2015, M. A... B..., représenté par Me Duvergier, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1501986 du tribunal administratif de Grenoble du 25 juin 2015 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 mars 2015 par lequel le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" et l'autorisant à travailler dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision en litige est entachée d'erreur de fait en ce qui concerne son domicile et la date de son mariage ;
- elle méconnaît les dispositions combinées du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 211-2-1 du même code, dès lors que son entrée sur le territoire français était régulière, que la demande de titre de séjour vaut demande de visa de long séjour et qu'il justifie de six mois de vie commune avec son épouse ; à défaut, il y aurait lieu de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne sur le point de savoir si l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen conditionne la régularité de l'entrée sur le territoire d'un Etat contractant à la déclaration d'entrée qu'il prévoit ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il est marié avec une ressortissante française, que le couple a entrepris en France les soins nécessaires pour traiter l'infertilité de son épouse, que huit de ses frères et soeurs vivent en France, en Belgique ou en Espagne et que le délai d'obtention d'un visa de long séjour auprès des autorités françaises au Maroc est très long ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision en litige est entachée d'erreur de fait en ce qui concerne son domicile et la date de son mariage ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Un mémoire, enregistré le 1er février 2017 et présenté pour M. B..., n'a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;
- le règlement (CE) n°539/2001 du 15 mars 2001 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des Etats membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu le rapport de M. Hervé Drouet, président-assesseur, au cours de l'audience publique ;
Sur le refus de titre de séjour :
1. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... ;
2. Considérant, en deuxième lieu, que si le requérant soutient que le préfet a commis une erreur de fait en indiquant qu'il était domicilié ...domicilié,... ; que, dans ces conditions, le moyen susmentionné tiré de l'erreur de fait doit être écarté ;
3. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; / (...) " ; que l'article L. 311-7 de ce code dispose : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " ; que selon l'article L. 211-2-1 du même code dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " La demande d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande. / (...) / Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. / (...) / Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes peuvent être tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités compétentes de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration est souscrite, au choix de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent, soit à l'entrée, soit dans un délai de trois jours ouvrables à compter de l'entrée. " ;
4. Considérant qu'il est constant que M. B..., qui est entré régulièrement sur le territoire espagnol le 5 août 2009 sous couvert d'un visa Schengen C valable trente jours et qui s'est marié le 26 janvier 2013 avec une ressortissante française, n'a pas souscrit à la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen et dont l'obligation, qui figure à l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire ; que, dans ces conditions, M. B...ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français ; que, dès lors, le préfet a pu légalement opposer l'absence de visa de long séjour à sa demande de titre présentée sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite et sans qu'il soit besoin de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 211 2-1 et du 4° de l'article L. 313-11 dudit code ;
5. Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme inopérant, M. B... n'ayant pas sollicité de titre de séjour sur ce fondement, sur lequel le préfet ne s'est pas prononcé ;
6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications. " ;
7. Considérant que M. B..., né le 20 octobre 1978 et de nationalité marocaine, fait valoir qu'il est marié avec une ressortissante française depuis le 26 janvier 2013, que le couple a entrepris en France les soins nécessaires pour traiter l'infertilité de son épouse, que huit de ses frères et soeurs vivent en France, en Belgique ou en Espagne et que le délai d'obtention d'un visa de long séjour auprès des autorités françaises au Maroc est très long ; que, toutefois, ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4, l'intéressé n'était pas fondé à obtenir un titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans et où résident sa mère et deux de ses soeurs ; qu'il a la possibilité, malgré la longueur alléguée de la procédure de demande de visa de long séjour dans son pays d'origine, de revenir en France auprès de son épouse après avoir obtenu un tel visa ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée de refus de titre de séjour n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles, en tout état de cause, de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et familiale du requérant ;
8. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 7 que la circonstance que le préfet aurait mentionné dans sa décision de refus de titre en litige une date de mariage de M. B... au 13 janvier 2013 alors qu'il s'est marié le 26 janvier 2013 est sans incidence sur la légalité de cette décision ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... ;
10. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives à la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale", est inopérant à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français ;
11. Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 7, la décision obligeant M. B... à quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
12. Considérant, en dernier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 2 et 8, doivent écartés les moyens tirés d'erreurs de fait concernant le domicile et la date de mariage de l'intéressé ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et de mise à mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 7 février 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
- M. Hervé Drouet, président-assesseur,
- M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 février 2017.
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N° 15LY02712
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