Par un jugement n° 1804585 du 2 juin 2020, le tribunal administratif de Marseille a condamné, d'une part, l'ONIAM à payer à M. A... F... la somme de 10 000 euros, à Mme F... née J... la somme de 10 984 euros, à Mme F... née J... en qualité de représentante de M. K... F... la somme de 8 000 euros, à M. G... F... et Mme C... F... la somme de 1 800 euros chacun et à M. H... J... et Mme E... J... la somme de 2 000 euros chacun en réparation des préjudices subis et, d'autre part, l'AP-HM à payer à M. A... F... la somme de 15 000 euros, à Mme F... née J... la somme de 16 476 euros, à Mme F... née J... en qualité de représentante de M. K... F... la somme de 12 000 euros, à M. G... F... et Mme C... F... la somme de 2 700 euros chacun et à M. H... J... et Mme E... J... la somme de 3 000 euros chacun en réparation des préjudices subis et, enfin, mis les frais d'expertise liquidés à la somme de 1 550,92 euros à la charge de l'AP-HM et de l'ONIAM, respectivement à hauteur de 60 % et 40 %.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 août 2020, Mme F... née J... agissant en qualité d'ayant-droit de son enfant décédée B... F... ainsi qu'en qualité de représentante de son enfant mineur M. K... F... et M. A... F... agissant en qualité d'ayant-droit de son enfant décédée B... F..., représentés par Me Ghez, demandent à la Cour :
1°) d'annuler l'article 6 du jugement du 2 juin 2020 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de condamner l'AP-HM à leur payer, en leur qualité d'ayants-droit de B... F..., la somme de 120 000 euros en réparation du préjudice corporel que cette dernière a subi ;
3°) de condamner l'ONIAM à leur payer, en leur qualité d'ayants-droits de B... F..., la somme de 80 000 euros en réparation du préjudice corporel que cette dernière a subi ;
4°) de mettre à la charge solidaire de l'AP-HM et de l'ONIAM le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur fille et sœur jumelle ayant été victime successivement d'un aléa thérapeutique et d'une faute médicale ayant conduit à son décès, ils sont fondés à demander réparation du préjudice qu'elle a subi, qui est entré dans son patrimoine avant son décès ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, leur fille et sœur, ayant regagné un état de conscience après l'intervention pratiquée le 8 décembre 2015, a enduré des souffrances et subi un préjudice d'angoisse né de la perte de survie qui seront justement indemnisés par l'octroi d'une somme de 200 000 euros dont 60% sera mise à la charge de l'AP-HM et 40% à la charge de l'ONIAM.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 mai 2021, l'AP-HM, représentée par Me Le Prado, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par les consorts F... ne sont pas fondés et, en admettant même le principe d'un préjudice lié à la conscience d'une espérance de vie réduite, la demande des requérants est excessive.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2021, l'ONIAM, représenté par Me de la Grange, demande à la cour de rejeter la requête des consorts F....
Il soutient qu'il ne peut être condamné in solidum avec le tiers responsable dès lors qu'il intervient au titre de la solidarité nationale et que, en tout état de cause, le préjudice dont la réparation est demandée, n'est pas justifié, la jeune victime n'ayant pas regagné un état de conscience après l'intervention de récupération de la prothèse pratiquée le 9 décembre 2015 jusqu'à la date de son décès, le 23 décembre suivant.
La requête a été communiquée le 8 septembre 2020 à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et à la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Alpes qui n'ont pas produit de mémoire.
Par ordonnance du 27 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 septembre 2021.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massé-Degois,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Bergeron, représentant l'AP-HM.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme F..., en leur qualité d'ayants-droit de leur fille décédée, Mme B... F..., et Mme F... en sa qualité de représentante légale de son fils mineur, M. K... F..., relèvent appel du jugement du 2 juin 2020 en tant que les premiers juges ont, par l'article 6 de leur décision, rejeté le surplus de leur demande consistant en la réparation du préjudice corporel de leur enfant et sœur défunte.
2. Les requérants, en se prévalant de leur qualité d'ayants-droit, demandent réparation à hauteur d'une somme de 200 000 euros des souffrances endurées par l'enfant B... F... et du préjudice d'angoisse éprouvé par celle-ci né de la perte de chance de survie. Ils font valoir que ce chef de préjudice aurait consisté dans la douleur morale éprouvée par leur enfant et sœur du fait de sa conscience de la réalisation en urgence d'une seconde intervention ainsi que d'une espérance de vie réduite.
3. Toutefois, il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté, d'une part, que l'état de santé de la jeune B... F..., alors âgée de moins de trois ans, après la première intervention réalisée le 8 décembre 2015 pour la fermeture du canal artériel par cathétérisme avec mise en place d'une prothèse, était asymptomatique, l'examen clinique de l'intéressée ayant montré que celle-ci s'était normalement alimentée et qu'elle ne présentait aucun signe de défaillance et d'ischémie et, d'autre part, que seuls les examens radiographique et échographique, qui ont mis en évidence la migration de la prothèse au niveau de l'aorte mésentérique, ont justifié la réalisation en urgence le 9 décembre suivant, la seconde intervention à l'issue de laquelle elle n'a pas regagné un état de conscience. Dans ces circonstances, les consorts F... n'établissent pas que leur fille et sœur défunte, eu égard également à son très jeune âge, a eu conscience entre son réveil de l'intervention initiale du 8 décembre 2015 et la reprise chirurgicale le lendemain, d'une espérance de vie réduite.
4. Il résulte de ce qui précède que les consorts F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille n'a fait droit à leur demande indemnitaire qu'à hauteur des sommes qu'il leur a allouées.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'AP-HM et de l'ONIAM qui n'ont pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme dont les consorts F... sollicitent le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête des consorts F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... F... née J..., à M. A... F..., à l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et à la caisse primaire d'assurance maladie des Hautes-Alpes.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.
2
N° 20MA02741