Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 10 août 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 27 juillet 2015 ;
2°) de rejeter la demande de M.A....
Il soutient que l'ancienneté de plus d'un an de l'obligation de quitter le territoire fondant le placement en rétention s'apprécie au jour du placement de l'étranger et non au jour où le juge statue.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Laso a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par un arrêté du 24 juillet 2014, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. A..., ressortissant algérien, déclarant être entré en France le 23 octobre 2013, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que, par une décision du 23 juillet 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé le placement en rétention administrative de l'intéressé pour une durée de cinq jours soit jusqu'au 28 juillet 2015 ; que le préfet des Bouches-du-Rhône relève appel du jugement du 27 juillet 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / (...) / 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé " ;
3. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'une mesure de placement en rétention ne peut être décidée sur le fondement du 6° de cet article que sous réserve que la mesure d'éloignement ait été prise moins d'un an auparavant ; que le délai d'un an prévu par ces dispositions court à compter non pas de la date à laquelle est notifiée à l'intéressé l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français, mais de la date à laquelle l'autorité compétente prend la décision de lui assigner une telle obligation ; qu'en l'espèce, l'arrêté par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a obligé le requérant à quitter le territoire français a été pris le 24 juillet 2014 ; que, par ailleurs, la légalité d'une mesure de placement en rétention s'apprécie à la date à laquelle elle est prise ; que la circonstance que la validité de l'obligation de quitter le territoire expire durant la période de rétention de l'intéressé est sans incidence sur sa légalité ; que, dès lors, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur de droit en décidant le 23 juillet 2015 le placement en rétention administrative de M. A...pour une durée de cinq jours ; que, par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal de Marseille a annulé pour ce motif cette décision ;
4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Marseille ;
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-2 du même code : " La décision de placement (...) est écrite et motivée (...) " ; qu'en l'espèce, la décision portant placement en rétention en litige vise les textes sur lesquels elle se fonde, notamment l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée en droit quand bien même elle ne mentionne pas l'article L. 561-2 du même code relatif aux mesures d'assignation à résidence ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que M. A...n'a pas fait l'objet d'une mesure d'assignation à résidence ne suffit pas à révéler que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle avant de le placer en rétention administrative ; que l'intéressé n'est donc pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
7. Considérant, en troisième lieu, que, par les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicables, le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure, administratives et contentieuses, auxquelles sont soumises les décisions décidant le placement en rétention administrative ; que le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnait les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 dès lors que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas invité l'intéressé à présenter des observations avant de prendre cette décision et de se faire assister par un mandataire de son choix est inopérant et doit, par suite, être écarté ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que, comme il a été dit au point 3, la décision portant placement en rétention administrative est légalement fondée sur les dispositions de l'article L 551-1 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que cette décision est entachée de défaut de base légale ;
9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation " ; qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du même code : " (...) Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement / (...) / ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 [...] " ; qu'aux termes de l'article L. 554-1 du même code : " Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet " ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...n'a, comme il a été dit au point 3, pas satisfait, dans le délai imparti de trente jours, à l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 24 juillet 2014 ; que si l'intéressé a produit, alors qu'il était placé en rétention, la copie de son passeport en cours de validité et s'il fait valoir qu'il dispose d'un logement stable alors qu'il est hébergé chez un ami depuis son arrivée en France, ces circonstances ne peuvent permettre d'établir qu'il présenterait des garanties propres à permettre de prévenir un risque de soustraction à l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français ; que, dans ces conditions, le préfet des Bouches-du-Rhône a pu, sans commettre ni erreur de droit ni erreur d'appréciation ni méconnaître le principe de proportionnalité, considérer que l'intéressé ne disposait pas de garanties de représentation effectives de nature à garantir le risque de fuite pour pouvoir être assigné à résidence et ordonner, en conséquence, son placement en rétention administrative ; que, pour les mêmes raisons, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas davantage entaché sa décision d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A... ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Bouches-du-Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 23 juillet 2015 décidant le placement de M. A...en rétention administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du 27 juillet 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016 où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- M. Laso, président assesseur,
- M. Lafay, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.
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15MA03363