Par un jugement n° 1701729 du 27 septembre 2017, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté préfectoral du 5 avril 2017, a enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 26 octobre 2017, le préfet des Alpes-Maritimes demande à la Cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 27 septembre 2017.
Il soutient que :
- l'arrêté ne porte pas atteinte au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé compte tenu de la faible durée de son séjour et de sa situation personnelle ;
- il ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-11-2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la mesure d'éloignement prise à son encontre ne présente aucun caractère insurmontable ou incommode ou disproportionné au sens de l'arrêt Jeunesse c/ Pays-Bas de la Cour européenne des droits de l'homme rendu le 3 octobre 2014 ;
- en l'absence de tout document justifiant du suivi de sa scolarité en 2016/1017, le caractère réel et sérieux de sa scolarité ne peut être retenu ;
- l'arrêté est suffisamment motivé ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2018, M. B... représenté par Me A... conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le préfet des Alpes-Maritimes ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Boyer a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que le préfet des Alpes-Maritimes relève appel du jugement du 27 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté préfectoral du 5 avril 2017 refusant à M. B... la délivrance du titre de séjour qu'il avait sollicité, l'obligeant à quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, lui a enjoint de délivrer à M. B... un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a condamné l'Etat à verser à M. B... une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 11 de l'accord franco-tunisien modifié du 17 mars 1988 susvisé : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent accord, dans les conditions prévues par sa législation. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) " ;
3. Considérant que s'il ressort des pièces du dossier que M. B... a suivi une scolarité exemplaire au cours de l'année 2015/2016 en classe de " seconde Pro mention technicien en installation des systèmes énergétiques et climatique " au sein du lycée professionnel Vauban, cette seule circonstance ne saurait justifier ni de l'existence en France d'une vie privée au sens des dispositions citées du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile ni d'une insertion particulièrement remarquable au sens de ces mêmes dispositions ; que M. B... qui ne conteste pas être entré pour la dernière fois en France le 19 février 2016 ne peut se prévaloir que d'un très court séjour en France au jour de l'arrêté contesté ; qu'il est célibataire, sans enfant et ne démontre pas ne plus avoir d'attache familiale dans son pays d'origine ; qu'ainsi le préfet des Alpes-Maritimes ne pouvait être regardé comme ayant porté une atteinte excessive au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale en prenant l'arrêté contesté ; que, par suite, le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a annulé pour ce motif cette décision sur le fondement des articles visés du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Nice ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. " ; que, suivant ces dispositions, l'étranger qui sollicite une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " doit justifier de la possession d'un visa de long séjour ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. B... est entré en France muni d'un visa de court séjour ; qu'il ne justifie pas avoir poursuivi ses études au cours de l'année 2016/2017 ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir, à supposer même qu'il en remplisse les autres conditions, qu'un titre de séjour mention étudiant aurait dû lui être délivré au titre de l'année scolaire dont il s'agit sur le fondement de l'article L. 313-7 cité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant qu'en tout état de cause et à supposer même qu'il puisse s'en prévaloir utilement, M. B... ne peut, pour les motifs énoncés au point 3, soutenir qu'il serait porté une atteinte disproportionnée au droit à l'enseignement ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 5 avril 2017 et, d'autre part, que la demande de M. B... doit être rejetée ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 5 avril 2017 du tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nice est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. C... B....
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2018, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Boyer, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 avril 2018.
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N° 17MA04219
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