Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 25 avril 2016, et un mémoire complémentaire, enregistré le 28 octobre 2016, la commune du Lavandou, représentée par la SCP d'avocats CGCB, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 25 février 2016 ;
2°) de rejeter le déféré du préfet du Var présenté devant le tribunal administratif de Toulon ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a refusé de faire application de la décision n° 372531 du Conseil d'Etat du 9 novembre 2015, Commune de Porto-Vecchio, en raison de sa date d'intervention et il a méconnu la portée de cet arrêt ;
- le jugement est entaché de contradictions, le tribunal ayant estimé implicitement qu'elle était dotée d'un plan local d'urbanisme en vigueur, tout en faisant application du contrôle réservé aux communes non dotées d'un plan local d'urbanisme applicable ;
- le tribunal a méconnu le champ d'application de la loi en n'examinant pas d'office l'applicabilité des dispositions de l'article L. 146-4-I du code de l'urbanisme aux faits de l'espèce ;
- en s'abstenant de rouvrir l'instruction pour lui permettre de se prévaloir d'un revirement de jurisprudence du Conseil d'Etat, le tribunal a porté atteinte à la bonne administration de la justice ;
- le tribunal a méconnu le principe du contradictoire en s'abstenant de rouvrir l'instruction après l'examen au fond d'un mémoire enregistré après la clôture de l'instruction ;
- les dispositions de la loi littoral n'étaient pas applicables directement à l'arrêté attaqué, qui est conforme aux dispositions du plan local d'urbanisme, lui-même compatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCoT) Provence méditerranée, lequel identifie le quartier de Cavalière comme un pôle urbain à conforter ;
- elle reprend, en outre, les moyens invoqués en défense en première instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2016, le préfet du Var conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Portail,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune du Lavandou.
1. Considérant que Mme A..., propriétaire d'un tènement d'une superficie de 10 412 m², cadastré section AR 145, AR 58, sis sur le territoire de la commune du Lavandou, dans le quartier de Cavalière, a déposé, le 21 août 2013, une déclaration préalable pour la division de ce terrain en trois lots en application de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme, comportant un lot A, cadastré suite à la division AR 148, d'une superficie de 4 857 m², un lot B nouvellement cadastré AR 146, d'une superficie de 1 500 m², destiné à être bâti, et un lot C, nouvellement cadastré AR 147, d'une superficie de 3 981 m², en surplus de propriété ; que, par un arrêté du 7 octobre 2013, le maire de la commune du Lavandou a décidé de ne pas s'opposer à cette déclaration préalable; que, sur déféré du préfet du Var, le tribunal administratif de Toulon a annulé cet arrêté en se fondant sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 146-4-I du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable; que la commune du Lavandou relève appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'instruction est normalement close, à défaut d'ordonnance de clôture, trois jours francs avant la date de l'audience ; que toutefois, lorsque, postérieurement à cette clôture, le juge est saisi d'un mémoire émanant d'une partie, il lui appartient de faire application dans ce cas particulier des règles générales relatives à toutes les productions postérieures à la clôture de l'instruction ; qu'à ce titre, et conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l'instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi, au demeurant, que de le viser sans l'analyser ; que s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte - après l'avoir visé, et, cette fois, analysé - il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office au vu du dossier tel qu'il existait à la date de clôture de l'instruction ;
4. Considérant que si le tribunal administratif de Toulon a exposé dans son jugement qu'il n'entendait pas rouvrir les débats, à la suite du mémoire produit par la commune du Lavandou et enregistré après la clôture de l'instruction, au motif notamment que le revirement de jurisprudence allégué par la commune du Lavandou était dépourvu de portée sur le litige en cause, cette circonstance est sans influence sur la régularité du jugement attaqué ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en ne procédant pas à la réouverture de l'instruction, qui avait été close le 31 janvier 2016 à minuit, et en ne communiquant pas le mémoire enregistré le 1er février 2016 dans lequel la commune du Lavandou se prévalait de la décision n° 372531, Commune de Porto-Vecchio, rendue le 9 novembre 2015 par le Conseil d'Etat, circonstance de droit qui n'était pas susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le tribunal administratif de Toulon n'a pas entaché d'irrégularité la procédure au terme de laquelle il a statué ;
6. Considérant, en troisième lieu, que la circonstance alléguée que le tribunal administratif de Toulon aurait méconnu la décision précitée du Conseil d'Etat est sans influence sur la régularité de son jugement; qu'est également sans influence sur cette régularité la circonstance alléguée que les motifs du jugement attaqué comporteraient entre eux des contradictions ;
7. Considérant, en dernier lieu, et en tout état de cause, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le tribunal administratif de Toulon se serait abstenu d'examiner l'applicabilité aux faits de l'espèce des dispositions de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, désormais repris à l'article L. 121-8 du même code ;
Sur la légalité de l'arrêté du 7 octobre 2013 :
8. Considérant qu'eu égard, d'une part, au seul rapport de compatibilité prévu par l'article L. 111-1-1 du code de l'urbanisme entre les documents d'urbanisme qu'il mentionne et entre ces documents et les règles spécifiques à l'aménagement et à la protection du littoral et, d'autre part, au rapport de conformité qui prévaut entre les décisions individuelles relatives à l'occupation ou à l'utilisation du sol et ces mêmes règles, la circonstance qu'une telle décision respecte les prescriptions du plan local d'urbanisme ne suffit pas à assurer sa légalité au regard des dispositions directement applicables des articles L. 146-1 et suivants de ce code ;
9. Considérant qu'aux termes des dispositions du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : " L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages ; qu'une construction, qui n'est pas en continuité avec les agglomérations et villages existants, ne peut être autorisée qu'à la condition que le projet soit conforme à la destination d'une zone délimitée par le document local d'urbanisme, dans laquelle celui-ci prévoit la possibilité d'une extension de l'urbanisation de faible ampleur intégrée à l'environnement par la réalisation d'un petit nombre de constructions de faible importance, proches les unes des autres et formant un ensemble dont les caractéristiques et l'organisation s'inscrivent dans les traditions locales ;
10. Considérant, d'une part, que la parcelle cadastrée section AR n° 46, d'une superficie de 1 500m², issue de la division autorisée par l'arrêté en litige et destinée à être bâtie, est séparée des parcelles bâties à l'ouest, qui elles mêmes constituent d'ailleurs une zone d'urbanisation diffuse, par la parcelle cadastrée AR 147, qui n'est pas bâtie ; que la parcelle en litige jouxte à l'est une vaste zone naturelle ; que si le secteur situé au nord ouest de cette parcelle AR n° 46 est destiné par le plan local d'urbanisme du Lavandou à accueillir un hameau nouveau intégré à l'environnement, le plan local d'urbanisme n'inclut pas ladite parcelle dans ce hameau ; qu'enfin, si la parcelle située au sud de la parcelle cadastrée section AR n° 46 est bâtie, la partie, cadastrée AR 136, située au sud est, d'une superficie d'environ 3 000 m², est à l'état naturel ; qu'en ne s'opposant pas à la division du tènement, cadastré section AR 145 AR 58, qui prévoit la construction de la parcelle nouvellement cadastrée section AR n° 146, laquelle n'est pas en continuité avec les agglomérations et villages existants et n'est pas incluse dans une zone délimitée par le document local d'urbanisme, dans laquelle celui-ci prévoit la possibilité d'une extension de l'urbanisation de faible ampleur intégrée à l'environnement, le maire de la commune du Lavandou a méconnu les dispositions de l'article L. 146-4 alors applicable du code de l'urbanisme ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune du Lavandou n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé, pour ce motif, l'arrêté en litige; que, par voie de conséquence, ses conclusions accessoires tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la commune du Lavandou est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune du Lavandou et au ministre de la cohésion des territoires.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 31 août 2017, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme B..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 14 septembre 2017.
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N° 16MA01568