Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 juin 2016, M. et Mme C..., représentés par Me D..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 avril 2016 ;
2°) d'annuler les décisions de refus de titre de séjour du préfet de la Sarthe des 4 et 5 septembre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de leur délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer leurs demandes après leur avoir délivré des autorisations provisoires de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- ils remplissent les conditions requises pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et sur celui de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les refus de titre de séjour sont contraires à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les éléments caractérisant leur situation personnelle constituent des circonstances exceptionnelles justifiant la délivrance de titres de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2016, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 juillet 2016.
La demande d'aide juridictionnelle de Mme C... a été rejetée par une décision du 6 juillet 2016 comme faisant double emploi avec celle de M.C....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Aubert.
1. Considérant que M. et Mme C..., de nationalité algérienne, relèvent appel du jugement du 20 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions de refus de titre de séjour respectivement prises à leur encontre les 4 et 5 septembre 2014 par le préfet de la Sarthe, présentées sur le fondement du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, afin de pouvoir bénéficier en France d'une procédure d'assistance médicale à la procréation ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pris pour l'application des dispositions du 11º de l'article L. 313-11 du même code, auxquelles sont semblables, pour ce qui concerne les ressortissants algériens, les stipulations précitées du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) / ; Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé : " (...) le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / (...) " ;
3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant que, par deux avis rendus le 1er avril 2014, le médecin de l'agence régionale de santé des Pays de la Loire a estimé que l'état de santé de M. et Mme C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il n'existait pas en Algérie de traitement approprié à cet état de santé ; que le préfet de la Sarthe a opposé des décisions de refus de titre de séjour aux requérants au motif que leur situation n'était pas de nature à en justifier la délivrance au regard du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
6. Considérant qu'en se bornant à faire valoir que la meilleure procédure d'assistance médicale à la procréation est celle mise en place en France par un centre hospitalier parisien, M. et Mme C... n'établissent pas que l'impossibilité d'en bénéficier en Algérie est susceptible d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur leur état de santé ; que le moyen tiré de la méconnaissance du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doit, dès lors, être écarté ; qu'en outre, et en tout état de cause, ils ne justifient d'aucune circonstance humanitaire exceptionnelle au sens des dispositions de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont ils se prévalent ;
7. Considérant que les requérants font valoir que leur départ de France les priverait de leur droit de fonder une famille, qu'ils sont hébergés en France par le frère de M. C...et que les parents de ce dernier sont décédés ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et MmeC..., respectivement nés en 1964 et 1972, sont dépourvus d'attaches familiales en Algérie où ils ont vécu jusqu'en 2013 et où ils pourront poursuivre leur vie familiale avec leur enfant né en France en juin 2015 ; qu'en outre, et en tout état de cause, le droit de fonder une famille n'est pas utilement invoqué sur le fondement des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit, dès lors, être écarté ;
8. Considérant, enfin, que les conditions dans lesquelles M. et Mme C...peuvent être admis à séjourner en France sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; qu'il suit de là qu'ils ne peuvent utilement invoquer l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers au soutien de leurs conclusions à fin d'annulation ; qu'en tout état de cause, les éléments caractérisant leur situation personnelle ne constituent pas des circonstances humanitaires exceptionnelles de nature à leur ouvrir droit au séjour en France ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché d'insuffisance de motivation, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes ;
Sur le surplus des conclusions :
10. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérants ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., à Mme B...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Delesalle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mars 2017.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT01986 2
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