Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 juillet 2018 M. D...C..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 28 juin 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 27 février 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car il vit en couple depuis 2013 avec une compatriote, titulaire d'une carte de résident, qu'il a épousée le 11 juin 2016 et avec laquelle il a eu un enfant le 23 novembre 2017 ; il justifie de ce qu'il s'occupe quotidiennement des deux premiers enfants de son épouse et de l'enfant qu'il a eu avec elle ;
- cette décision méconnaît l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant car il remplit un rôle très important auprès des 3 enfants, son épouse, du fait de problèmes de santé, n'étant pas toujours en mesure de les prendre en charge ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation car son épouse, qui a une pathologie cardiaque grave et est mère d'un enfant français, ne peut pas le rejoindre au Congo ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 septembre 2018, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 11 septembre 2018 la clôture d'instruction a été fixée au 11 octobre 2018 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Un mémoire a été présenté pour M. C...le 13 décembre 2018, postérieurement à la clôture d'instruction.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Le Bris,
- et les observations de MeE..., représentant M.C....
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant de la République du Congo né en 1988, a obtenu durant l'été 2008 un titre de séjour pour poursuivre des études en Italie. Il déclare être entré en France en janvier 2013 pour rejoindre MmeA..., une compatriote et amie mère de deux enfants nés en 2008 et 2010 et titulaire d'une carte de résident. Il s'est marié avec Mme A...le 11 juin 2016 et le couple a eu un enfant né le 23 novembre 2017. M. C...a demandé le 2 novembre 2016 un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui lui a été refusé par un arrêté du 27 janvier 2017. Le 26 janvier 2018, il a déposé une nouvelle demande sur le même fondement. Il relève appel du jugement du 28 juin 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 février 2018 du préfet d'Indre-et-Loire refusant à nouveau de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant son pays de destination.
2. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée M. C...était marié depuis 20 mois avec Mme A...et partageait une vie commune avec elle et ses deux premiers enfants depuis au moins 4 ans. Le couple a, en outre, eu deux enfants, nés respectivement le 23 novembre 2017 et le 1er décembre 2018. En outre, les témoignages produits émanant des directeurs des écoles maternelle et élémentaire ainsi que des responsables de clubs sportifs fréquentés par les deux enfants aînés de Mme A...attestent de l'implication du requérant dans la vie quotidienne de ces enfants, d'autant plus que leur mère, qui est atteinte d'une pathologie cardiaque ayant nécessité plusieurs interventions chirurgicales et justifiant la reconnaissance de son handicap par la maison départementale des personnes handicapées, n'est pas toujours en mesure d'en assumer la charge. Enfin l'un des enfants de Mme A...est né d'un père de nationalité française, de sorte que la cellule familiale n'est pas susceptible de se reconstituer en République du Congo. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, M. C...est fondé à soutenir que le préfet d'Indre-et-Loire, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, n'a pas tenu compte de l'intérêt supérieur de ses enfants et des enfants de son épouse et a méconnu les stipulations de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Dès lors, la décision de refus de titre de séjour doit être annulée, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. L'exécution du présent arrêt implique, dans les circonstances de l'espèce, que le préfet d'Indre-et-Loire délivre à M. C..., sous réserve d'un changement de circonstances de fait ou de droit, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
DÉCIDE :
Article 1 : Le jugement n° 1801606 du tribunal administratif d'Orléans du 28 juin 2018 et l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 27 février 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet d'Indre-et-Loire de délivrer à M.C..., sous réserve d'un changement de circonstances de fait ou de droit, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2019 à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président assesseur,
- Mme Le Bris, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 janvier 2019.
Le rapporteur,
I. Le BrisLe président,
I. PerrotLe greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°18NT02861