- il n'a pas séjourné plus de cinq mois en Allemagne avant d'effectuer sa demande de protection internationale ;
- l'arrêté méconnaît l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 dès lors que les informations mentionnées à cet article ne lui ont pas été communiquées, dans une langue comprise par lui ;
- il n'a pas bénéficié de l'entretien individuel prévu par l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 ;
Sur l'arrêté portant assignation à résidence, que :
- il est illégal par exception d'illégalité de la décision de remise aux autorités allemandes ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2018, la préfète du Cher conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 septembre 2018.
Vu les informations produites par la préfète relatives à la prolongation du délai de transfert de M. B... pour cause de fuite.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant afghan, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 1er avril 2018 selon ses déclarations. Il a déposé une demande d'admission provisoire au séjour, le 20 avril 2018, en vue de demander l'asile. Les autorités allemandes ont été saisies d'une demande de réadmission le 7 juin 2018 en application du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. A la suite de leur accord explicite du 13 juin 2018, la préfète du Cher a, par un arrêté du 5 juillet 2018, décidé de transférer M. B... aux autorités allemandes responsables de l'examen de sa demande d'asile. La préfète a également décidé, par un arrêté du même jour, de l'assigner à résidence dans le département du Cher pour une durée de quarante-cinq jours. Par la requête visée ci-dessus, M. B... demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 25 juillet 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 5 juillet 2018.
Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire :
2. Il est constant que M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 3 septembre 2018. Par suite, les conclusions du requérant tendant à obtenir l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont sans objet. Il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de transfert :
3. D'une part, et en premier lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 : " Accès à la procédure d'examen d'une demande de protection internationale - (...) 2. Lorsqu'aucun Etat membre responsable ne peut être désigné sur la base des critères énumérés dans le présent règlement, le premier Etat membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite est responsable de l'examen. (...) ". Aux termes de l'article 13 de ce même règlement : " 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un Etat membre dans lequel il est entré en venant d'un Etat tiers, cet Etat membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. / 2. Lorsqu'un Etat membre ne peut pas, ou ne peut plus, être tenu pour responsable conformément au paragraphe 1 du présent article et qu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, que le demandeur qui est entré irrégulièrement sur le territoire des Etats membres ou dont les circonstances de l'entrée sur ce territoire ne peuvent être établies a séjourné dans un Etat membre pendant une période continue d'au moins cinq mois avant d'introduire sa demande de protection internationale, cet Etat membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. / Si le demandeur a séjourné dans plusieurs Etats membres pendant des périodes d'au moins cinq mois, l'Etat membre du dernier séjour est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. ".
4. D'autre part, aux termes de l'article 18 dudit règlement relatif aux obligations de l'Etat membre responsable : " 1. L'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : (...) b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre Etat membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre Etat membre (...).
5. Il ressort des pièces du dossier que les empreintes de M. B... ont été relevées par les autorités bulgares le 22 juillet 2014, par les autorités autrichiennes le 14 août 2014, par les autorités italiennes les 10 septembre 2014 et 20 janvier 2015, et enfin par les autorités allemandes, le 21 avril 2015. Saisies d'une demande de prise en charge en application du paragraphe 1 de l'article 13 précité, les autorités allemandes ont accepté leur responsabilité, sur le fondement du b) du paragraphe 1 de l'article 18 dudit règlement, reconnaissant ainsi que M. B... avait déposé une demande de protection internationale en Allemagne à une date indéterminée qui était en cours d'examen, ce qui n'est pas sérieusement contesté par l'intéressé. Dès lors que les conditions et la durée de séjour du requérant dans les différents Etats membres ne peut être déterminée avec certitude, au vu des pièces du dossier, s'agissant notamment de la durée de séjour en Allemagne et de la prise en compte des délais de douze et cinq mois prévus par les dispositions citées, et qu'il n'est pas soutenu ni même allégué que le requérant aurait déposé une demande d'asile dans un autre Etat membre avant de solliciter l'asile en Allemagne, ce dernier pays doit être regardé comme le premier Etat membre auprès duquel la demande de protection internationale a été introduite, impliquant par suite sa responsabilité dans l'examen de la demande d'asile de l'intéressé.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. / 3. La commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune ainsi qu'une brochure spécifique pour les mineurs non accompagnés, contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement ".
7. Il résulte des ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de l'examen de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus par les dispositions ci-dessus énoncées.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est vu remettre, le 20 avril 2018, lors de son entretien individuel, les différents guides d'information précisant les conditions d'application du règlement du 26 juin 2013, en langue pachtou, langue qu'il a déclaré comprendre. Le requérant a signé le résumé de l'entretien sans mentionner d'observations et sans aucune réserve. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article 4 du règlement précité auraient été méconnues.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Entretien individuel : 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les Etats membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'Etat membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ".
10. Il ressort des pièces du dossier, notamment du résumé de l'entretien individuel signé par l'intéressé, que M. B... a bénéficié de l'entretien prévu par l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, réalisé le 20 avril 2018 à la préfecture des Hauts-de-Seine avec le concours d'un interprète en langue pachtou. Ce résumé synthétise les principales informations fournies par le demandeur et son parcours d'asile en Europe. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) n°604/2013 doit être écarté.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté portant assignation à résidence :
11. Les moyens dirigés contre la décision portant remise aux autorités allemandes ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. B... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant assignation à résidence ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué la magistrate désignée du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par le requérant ne peuvent être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais de procédure.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire de M. B....
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information à la préfète du Cher.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Coiffet, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er octobre 2019.
Le rapporteur,
F. A...Le président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT03216