Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 septembre 2017 et 19 juillet 2018, la SARL GESTION HOTEL ARGENTEUIL, représentée par Me Zapf, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer, à hauteur de 45 171 euros, les réductions sollicitées ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le service a, à tort, refusé de tenir compte, en tant que termes de comparaison, des locaux-types proposés n° 6 du procès-verbal de la commune
d'Enghien-les-Bains, n° 48 du procès-verbal de la commune de Chelles, n° 32 du procès-verbal de la commune de Champigny-sur-Marne et n° 6 du procès-verbal ME de la commune de Sète.
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL GESTION HOTEL ARGENTEUIL fait appel du jugement du
7 juillet 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2014 et 2015 à raison de l'établissement hôtelier qu'elle exploite 1, rue Ary Scheffer dans la commune d'Argenteuil (Val-d'Oise), sous l'enseigne " Campanile " et classé " 2 étoiles ".
2. D'une part, aux termes de l'article 1447-0 du code général des impôts : " Il est institué une contribution économique territoriale composée d'une cotisation foncière des entreprises et d'une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ". Aux termes de l'article 1467 de ce code : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France (...) dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles
1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période (...) / La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe (...) ". Aux termes de l'article 1600 du même code :
" I.- Il est pourvu à une partie des dépenses des chambres de commerce et d'industrie de région ainsi qu'aux contributions allouées par ces dernières, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, aux chambres de commerce et d'industrie territoriales et à l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie au moyen d'une taxe pour frais de chambres constituée de deux contributions : une taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises et une taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (...) / II.-1.- La taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises mentionnée au I est due par les redevables de cette cotisation proportionnellement à leur base d'imposition (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties (...) est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte " et de l'article 1495 : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation ". Aux termes de l'article 1498 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ". L'article 324 AK de l'annexe III au code général des impôts a fixé la date de référence de la dernière révision générale des opérations foncières au 1er janvier 1970. Lorsqu'il est fait recours à une évaluation de la valeur locative par comparaison, le terme de comparaison doit être précisément identifié et la valeur de celui-ci déterminée au moyen de l'une des deux méthodes prévues par le b du 2° de l'article 1498 rappelé ci-dessus. Par ailleurs, lorsqu'aucune valeur locative ne peut être déterminée par application des règles prévues au 1° puis au 2° de l'article 1498 du code général des impôts, par référence au loyer du bien ou à défaut par comparaison, l'administration est fondée, en vertu du 3°, à déterminer cette valeur par voie d'appréciation directe, à partir de la valeur vénale du bien à la date de référence du 1er janvier 1970.
Sur la méthode d'évaluation par voie de comparaison :
4. Pour déterminer la valeur locative de l'immeuble à usage d'hôtel situé à Argenteuil que la société requérante exploite sous l'enseigne " Campanile ", le service a recouru, en premier lieu, à la méthode d'évaluation par comparaison en se référant, conformément aux dispositions précitées du a du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, au local type n° 11 du
procès-verbal " état C " complémentaire de la commune d'Argenteuil. Toutefois, après avoir admis, au cours de la procédure, que ce local-type avait été irrégulièrement évalué et ne pouvait donc être employé pour établir les impositions contestées et estimé qu'aucun terme de comparaison approprié ne pouvait être valablement retenu, il a proposé de recourir à la méthode d'évaluation par appréciation directe prévue par les dispositions du 3° de l'article 1498 du code général des impôts. La société conteste la mise en oeuvre de cette méthode au motif qu'il existerait des termes de comparaison permettant d'appliquer la méthode prévue au 2° de ce même article. Elle propose à titre de comparaison les locaux-type n° 6 du procès-verbal de la commune d'Enghien-les-Bains, n° 48 de celui de la commune de Chelles, n° 32 de la commune de Champigny-sur-Marne et n° 6 du procès-verbal ME de la commune de Sète. Ainsi, pour la société requérante, la méthode par comparaison pouvait valablement être retenue afin de fixer la valeur locative de l'immeuble en litige.
5. En premier lieu, le procès-verbal initial des opérations de révision des maisons exceptionnelles de la commune d'Enghien-les-Bains fait état de ce que le local-type n° 6 du procès-verbal " ME " - dont les modalités d'évaluation ne sont d'ailleurs pas précisées - n'était pas loué au 1er janvier 1970 dès lors qu'il était occupé par son propriétaire. De plus, cet immeuble correspond à un hôtel construit en 1950, classé " quatre étoiles luxe " exploité à proximité du lac et du casino de la ville, lequel ne saurait raisonnablement être comparé à un hôtel de chaîne exploité à Argenteuil, commune qui ne présente ni la même attractivité touristique ni, en conséquence, une clientèle et une zone de chalandise équivalentes à celles d'Enghien-les-Bains. Dès lors, le terme de comparaison proposé ne peut être retenu pour procéder à l'évaluation de l'établissement hôtelier concerné.
6. En deuxième lieu, le ministre soutient, sans être contredit sur ce point, que le
local-type n° 48 du procès-verbal des évaluations foncières de la commune de Chelles a été irrégulièrement évalué au vu d'un loyer révisé au 1er mai 1970, donc en méconnaissance des dispositions du b du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, lesquelles ne permettent de se référer qu'aux loyers en cours au 1er janvier 1970. De plus, il est constant qu'il correspond à un hôtel de préfecture ancien, construit en 1952, qui ne peut, par suite, être comparé à l'établissement à évaluer en sa qualité d'hôtel de chaîne de conception moderne. Par suite, ce local ne peut être utilement retenu pour la mise en oeuvre de la méthode d'évaluation par comparaison.
7. En troisième lieu, il est constant que le local-type n° 32 du procès-verbal des évaluations foncières de la commune de Champigny-sur-Marne correspond à un hôtel de préfecture de catégorie I construit en 1910, d'une capacité d'à peine seize chambres, qui ne peut valablement être comparé à l'établissement à évaluer, en sa qualité d'hôtel de chaîne de conception moderne, alors même que le confort proposé serait similaire dans cet établissement. Par suite, il ne peut pas davantage être retenu comme terme de référence.
8. En quatrième lieu, la SARL GESTION HOTEL ARGENTEUIL soutient que l'hôtel qu'elle exploite doit être évalué par rapport au local-type n° 6 du procès-verbal ME des évaluations foncières de la commune de Sète. Toutefois, la commune d'Argenteuil située en
Île-de-France à proximité de Paris, de Saint-Denis et de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, d'une part, et la commune de Sète, située en province, d'autre part, diffèrent notamment par la densité de leur population et de leurs réseaux de transport respectifs. De plus, à la différence d'Argenteuil et des villes de la grande couronne parisienne, la commune de Sète ne bénéficie pas de l'attractivité touristique de la capitale ou d'une grande ville comparable. Ainsi, elle ne peut être regardée comme présentant, d'un point de vue économique, une situation analogue à celle d'Argenteuil à laquelle elle ne saurait être utilement comparée. En outre, il s'agit d'un hôtel de conception ancienne construit en 1895 qui n'est pas comparable avec un hôtel de chaîne de conception moderne.
9. Dans ces conditions, la SARL GESTION HOTEL ARGENTEUIL ne peut sérieusement soutenir que les locaux-types situés dans ces communes peuvent être retenus pour procéder à l'évaluation, par comparaison, de l'hôtel de chaîne qu'elle exploite sous l'enseigne " Campanile " à Argenteuil.
10. Dans la mesure où la société requérante ne propose pas d'autres locaux-types et où l'administration indique, sans être utilement contredite sur ce point, qu'il n'existe pas d'autres termes de comparaison pertinents régulièrement évalués et présentant les mêmes caractéristiques que l'immeuble à évaluer, situés à Argenteuil ou dans une autre commune économiquement comparable, la SARL GESTION HOTEL ARGENTEUIL n'est pas fondée à soutenir que l'administration fiscale ne pouvait recourir à la méthode d'évaluation subsidiaire par voie d'appréciation directe prévue au 3° de l'article 1498 du code général des impôts afin de fixer la valeur locative de l'établissement hôtelier exploité sur le territoire de cette commune sous l'enseigne " Campanile ".
Sur la méthode d'évaluation par voie d'appréciation directe :
11. Aux termes de l'article 324 AB de l'annexe III au code général des impôts : " Lorsque les autres moyens font défaut, il est procédé à l'évaluation directe de l'immeuble en appliquant un taux d'intérêt à sa valeur vénale, telle qu'elle serait constatée à la date de référence si l'immeuble était libre de toute location ou occupation. Le taux d'intérêt susvisé est fixé en fonction du taux des placements immobiliers constatés dans la région à la date de référence pour des immeubles similaires " et aux termes de l'article 324 AC de la même annexe : " En l'absence d'acte et de toute autre donnée récente faisant apparaître une estimation de l'immeuble à évaluer susceptible d'être retenue, sa valeur vénale à la date de référence est appréciée d'après la valeur vénale d'autres immeubles d'une nature comparable ayant fait l'objet de transactions récentes, situés dans la commune même ou dans une localité présentant du point de vue économique une situation analogue à celle de la commune en cause. La valeur vénale d'un immeuble peut également être obtenue en ajoutant à la valeur vénale du terrain, estimée par comparaison avec celle qui ressort de transactions récentes relatives à des terrains à bâtir situés dans une zone comparable, la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 dudit immeuble, réduite pour tenir compte, d'une part, de la dépréciation immédiate et, d'autre part, du degré de vétusté de l'immeuble et de son état d'entretien, ainsi que de la nature, de l'importance, de l'affectation et de la situation de ce bien ".
12. L'administration propose deux évaluations selon la méthode de l'appréciation directe qui se fondent, pour la première, sur la valeur vénale de l'hôtel Ibis situé à Sarcelles
(Val-d'Oise) qui a fait l'objet d'un apport en 1981 et, pour la seconde, sur un acte de vente en état futur d'achèvement intervenu le 17 janvier 1984 portant sur un hôtel exploité sous l'enseigne Ibis à Bobigny (Seine-Saint-Denis). Elle a affecté à ces prix moyens, après application d'un abattement de 20 % dans la seconde évaluation, de l'indice INSEE du coût de la construction et d'ajustements pour tenir compte des différences entre les immeubles de référence et ceux à évaluer, un taux d'intérêt minimal de 7 %, pour obtenir la valeur locative foncière unitaire correspondante. Il en ressort, selon le cas, une valeur locative de 41 598 euros en ce qui concerne l'enseigne " Ibis " de Sarcelles, ainsi que de 38 914 euros en ce qui concerne l'enseigne " Ibis " de Bobigny, supérieures à celle retenue pour assoir les impositions en litige. La société requérante, qui ne conteste ni le choix des immeubles en cause ni les paramètres mis en oeuvre, conformes aux dispositions du 3° de l'article 1498 susvisé, ne peut donc prétendre à bénéficier d'une réduction de ses impositions.
13. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL GESTION HOTEL ARGENTEUIL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes. Ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL GESTION HOTEL ARGENTEUIL est rejetée.
4
N° 17VE02910