Résumé de la décision
La décision concerne la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée par M. A..., professeur d'université, concernant l'article L. 951-4 du Code de l'éducation, qui permet au ministre chargé de l'enseignement supérieur de prononcer une suspension conservatoire d'un enseignant-chercheur. M. A... arguait que cette disposition méconnaissait les droits garantis par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en portant atteinte à l'indépendance des enseignants-chercheurs et en ne respectant pas les droits de la défense. Le Conseil d'État a jugé que les arguments présentés n'étaient ni nouveaux ni sérieux et a décidé de ne pas renvoyer la QPC au Conseil constitutionnel.
Arguments pertinents
1. Caractère conservatoire de la mesure: Le Conseil d'État a souligné que la suspension prévue par l'article L. 951-4 est une mesure conservatoire, "s'accompagnant d'un maintien du traitement" et visant à "préserver l'intérêt du service public universitaire". En conséquence, le Conseil a estimé que cette mesure ne constituait pas une sanction, ce qui écarte les violations des droits de l'enseignant-chercheur.
2. Respect des droits de la défense: Le Conseil a argué que la mesure ne pouvait être mise en œuvre que si les faits présentés étaient de "suffisante vraisemblance et de gravité" et qu’une procédure disciplinaire devait suivre rapidement. Cela assure, selon le Conseil d'État, le respect des droits de la défense en évitant une suspension indéfinie.
3. Liberté d'expression: Concernant l'argument selon lequel la disposition porterait atteinte à la liberté d'expression des enseignants-chercheurs, le Conseil d'État a relevé que "ces dispositions n'ont, ni pour objet ni pour effet, de priver l'enseignant-chercheur suspendu de sa liberté d'expression". Il a estimé que le moyen n'était pas sérieux.
Interprétations et citations légales
- Article L. 951-4 du Code de l'éducation: L'article précise que : "Le ministre chargé de l'enseignement supérieur peut prononcer la suspension d'un membre du personnel de l'enseignement supérieur pour un temps qui n'excède pas un an, sans suspension de traitement". Le Conseil a interprété ce texte comme étant destiné à assurer la continuité du service public tout en permettant une réaction rapide face à des comportements inappropriés d'enseignants-chercheurs.
- Article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (1789): Bien que M. A... invoque cet article pour soutenir qu'il s'agit d'une violation des droits fondamentaux, le Conseil d'État a jugé que les dispositions de l'article L. 951-4 n'étaient pas en contravention avec cet article en raison de leur nature conservatoire.
- Article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (1789): Le Conseil a rejeté l'idée que la possibilité d'une suspension ait un effet dissuasif sur la liberté d'expression, en argumentant que les dispositions ne limitaient pas cette liberté de manière expresse.
En conclusion, le Conseil d'État a jugé que les moyens soulevés par M. A... ne remplissaient pas les conditions nécessaires pour justifier un renvoi au Conseil constitutionnel, car ils manquaient de nouveauté et de sérieux. Ainsi, la QPC a été écartée.