Résumé de la décision
La présente décision émane du Conseil d'État, qui se prononce sur une question prioritaire de constitutionnalité relative à l'article L. 242-1 du code des juridictions financières. La commune de Sainte-Rose conteste le monopole des poursuites attribué au ministère public près les juridictions financières, arguant que cette disposition porte atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif. Le Conseil d'État renvoie cette question au Conseil constitutionnel, estimant qu'elle soulève un caractère sérieux, et sursoit à statuer sur le pourvoi de la commune et de ses représentants jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel.
Arguments pertinents
1. Monopole des poursuites : L'article L. 242-1 du code des juridictions financières confie au ministère public un monopole des poursuites à l'encontre des comptables publics, ce qui empêche une collectivité publique de contester des manquements qui ne seraient pas explicitement mentionnés dans le réquisitoire. Ce fait est essentiel, car il questionne la capacité d'une collectivité à obtenir justice pour des préjudices subis à cause de la gestion des comptables. Le Conseil d'État souligne que cette restriction peut porter atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif.
> "Le moyen tiré de ce que ces dispositions, en tant qu'elles instituent au profit du ministère public un monopole des poursuites... porte atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif garanti par la Constitution."
2. Saisine du Conseil constitutionnel : Le Conseil d'État examine si les conditions de la question prioritaire de constitutionnalité sont remplies. Il conclut que l'article L. 242-1 est applicable au litige, qu'il n’a pas été précédemment déclaré conforme à la Constitution, et que la question soulevée présente un caractère sérieux.
> "Il ressort... que... le juge des comptes ne peut, en première instance comme en appel, se prononcer au-delà des termes du réquisitoire du ministère public."
Interprétations et citations légales
1. Article L. 242-1 du Code des juridictions financières : Ce texte précise que le ministère public près le juge des comptes détient un monopole des poursuites, limitant ainsi la capacité pour les collectivités de contester les comptes au-delà des charges énoncées dans le réquisitoire. Cette interprétation empêche une approche plus holistique des comptes publics, réduisant le rôle des collectivités dans le contrôle.
> "Le juge des comptes ne peut... se prononcer au-delà des termes du réquisitoire du ministère public."
2. Article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 : Cet article établit les conditions pour soulever une question prioritaire de constitutionnalité. Le Conseil d'État s'y réfère pour confirmer que les conditions sont satisfaites dans le cas présent, autorisant ainsi le renvoi au Conseil constitutionnel.
> "Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'État."
En conclusion, cette décision met en lumière des enjeux cruciaux concernant le cadre juridique des poursuites financières des comptables publics et les droits des collectivités de contester ces poursuites. Le résultat est un renvoi du fleuve juridique vers le Conseil constitutionnel, qui devra clarifier la conformité de ces articles avec les principes constitutionnels.