Par un arrêt nos 12VE01011, 12VE01012 du 9 juillet 2013, la Cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les requêtes du DEPARTEMENT DU VAL-D'OISE et du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SANTE et mis à la charge de l'État la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par une décision n° 372470 du 5 octobre 2015, le Conseil d'État a annulé l'arrêt de la Cour et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Versailles.
Procédures devant la Cour :
I- Par une requête enregistrée sous le n° 12VE02011, le 24 mai 2012, et, après retour de cassation et renvoi, un mémoire récapitulatif enregistré le 22 avril 2016 sous le n° 15VE3156, le DEPARTEMENT DU VAL-D'OISE, représenté par Me Guinot, avocat, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1° d'annuler le jugement n° 1005634 du 13 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé, à la demande de la Fédération des APAJH, la décision en date du 3 mai 2010 prise par le président du conseil général du Val-d'Oise, conjointement avec le directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, rejetant la candidature de la fédération des APAJH pour le transfert des structures médico-sociales jusqu'alors gérées par l'association Le Colombier ;
2° de rejeter la demande présentée par la Fédération des APAJH devant le tribunal administratif ;
3° de mettre à la charge de la Fédération des APAJH la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le DEPARTEMENT DU VAL-D'OISE soutient que :
- le tribunal a soulevé d'office un moyen qui n'était pas d'ordre public, tiré de ce qu'aucune disposition n'habilite le préfet et le président du conseil général ou le directeur de l'agence régionale de santé à organiser le transfert des biens, activités et contrats de travail de l'organisme gestionnaire d'un établissement médico-social vers un autre organisme ;
- le jugement a été rendu en méconnaissance de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;
- le Conseil d'Etat a jugé, dans sa décision du 5 octobre 2015, que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en estimant que le président du conseil général du département du Val-d'Oise et le préfet du Val-d'Oise n'étaient pas compétents pour organiser la sélection des organismes pour la reprise des activités jusqu'alors assurées par l'association Le Colombier ;
- la Fédération des APAJH n'est pas recevable à invoquer pour la première fois en appel les moyens tirés, d'une part, de ce que la procédure d'appel à candidatures et de sélection organisée par le département du Val-d'Oise et par l'Etat n'aurait pas été transparente et, d'autre part, de ce que ces autorités auraient méconnu les règles de sélection des candidats qu'ils avaient eux-mêmes fixées, en ne sollicitant pas l'avis de la commission d'examen prévue dans l'appel à candidatures ; ces deux moyens ne sont pas fondés.
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II- Par une requête enregistrée sous le n° 12VE02012, le 24 mai 2012, et, après retour de cassation et renvoi, le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SANTE, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1005634 du 13 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé, à la demande de la Fédération des APAJH, la décision en date du 3 mai 2010 prise par le président du conseil général du Val-d'Oise, conjointement avec le directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, rejetant la candidature de la Fédération des APAJH pour le transfert des structures médico-sociales jusqu'alors gérées par l'association Le Colombier ;
2° de rejeter la demande présentée par la fédération des APAJH devant le tribunal administratif.
Le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SANTE soutient que :
- le jugement a été rendu en méconnaissance de l'article R. 611-7 du code de justice administrative dès lors que les parties n'ont pas été invitées à présenter leurs observations sur le moyen tiré de l'incompétence du président du conseil général du Val-d'Oise et du directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France pour prendre la décision litigieuse ;
- la décision attaquée n'est pas la décision de fermeture des établissements médico-sociaux mais le rejet de la candidature de la fédération des APAJH ;
- sur le fondement des dispositions des articles L. 313-17 et L. 313-18 du code de l'action sociale et des familles, le directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France et le président du conseil général du Val-d'Oise étaient compétents pour transférer les autorisations et mettre en oeuvre une procédure de transfert de gestion.
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Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code des marchés publics ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Le Gars,
- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,
- et les observations de Me Guinot pour le DEPARTEMENT DU VAL-D'OISE.
Une note en délibéré, enregistrée le 1er juillet 2016, a été présentée pour la Fédération des APAJH.
Sur la jonction :
1. Considérant que les requêtes enregistrées sous les numéros 15VE03156 et 15VE03157 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles : " La création, la transformation ou l'extension des établissements et services mentionnés à l'article L. 312-1 sont soumises à autorisation, sous réserve des dispositions de l'article L. 313-1-1. (...) " et qu'aux termes de l'article L. 313-18 du même code : " La fermeture définitive du service, de l'établissement ou du lieu de vie et d'accueil vaut retrait de l'autorisation prévue à l'article L. 313-1. Cette autorisation peut être transférée par l'autorité qui l'a délivrée à une collectivité publique ou un établissement privé poursuivant un but similaire, lorsque la fermeture définitive a été prononcée sur l'un des motifs énumérés aux articles L. 313-16, L. 331-5 et L. 331-7. En cas d'autorisation conjointe, ce transfert est prononcé à l'initiative de l'une ou l'autre des autorités compétentes, pour ce qui la concerne, ou d'un accord commun. " ;
3. Considérant que le préfet du Val-d'Oise et le président du conseil général du même département ont institué le 17 décembre 2009 une procédure de sélection, intitulée " appel à manifestation d'intérêt " en vue de retenir les organismes susceptibles de reprendre les activités des établissements et services gérés par l'association Le Colombier accueillant des personnes handicapées mentales dans le département et qui connaissait de graves difficultés financières et de gouvernance ; qu'à l'issue de cette procédure de sélection, la candidature de la Fédération des APAJH a été rejetée par une décision prise le 3 mai 2010 par le directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France et le président du conseil général du Val-d'Oise ;
4. Considérant que le transfert d'autorisation prévu par l'article L. 313-18 du code de l'action sociale et des familles a pour objet de permettre à une autre personne physique ou morale de droit public ou de droit privé de poursuivre l'exploitation d'un établissement ou d'un service social ou médico-social dont la fermeture définitive est intervenue notamment en application de l'article L. 313-16 du même code, afin d'assurer la continuité de son activité ; qu'il appartient aux autorités compétentes, si elles entendent mettre en oeuvre ces dispositions, de rechercher la collectivité ou l'organisme auquel la gestion de l'établissement ou du service peut être transférée, dans le but de garantir au mieux la continuité de la prise en charge des personnes accueillies ; que si aucune disposition du code de l'action sociale et des familles n'organise la procédure au terme de laquelle les autorités compétentes peuvent opérer ce choix, il leur est toujours loisible d'organiser une procédure transparente d'appel à candidatures et de sélection, en vue de choisir un organisme repreneur ; que, par suite, c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a accueilli le moyen tiré de ce que les représentants de l'État et du département, autorités détentrices du pouvoir de délivrer l'autorisation, n'étaient pas compétents pour organiser une telle procédure ;
5. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la Fédération des APAJH devant le tribunal administratif et devant elle ;
6. Considérant, en premier lieu, que la décision de rejet de la candidature de la Fédération des APAJH dans le cadre de la procédure d'appel à manifestation d'intérêt organisée conjointement par le préfet du Val-d'Oise et le président du conseil général du DEPARTEMENT DU VAL-D'OISE ne constitue pas le refus d'une autorisation au sens des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, aujourd'hui codifié à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; qu'elle n'entre dans aucune autre catégorie de décision administrative devant faire l'objet d'une motivation en application de ces dispositions ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit, par suite, être écarté ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'en organisant une procédure d'appel à candidatures et de sélection pour transférer la gestion des établissements et services gérés par l'association Le Colombier, les autorités compétentes n'ont pas procédé à un appel d'offres en vue de la conclusion d'un marché public ; qu'il suit de là que la Fédération des APAJH ne peut utilement invoquer la méconnaissance des textes ou principes régissant la commande publique ; qu'en outre, l'article III de l'appel à manifestation d'intérêt précise que les candidats " devront exposer dans un document synthétique les motifs de leur candidature ", " apporter les éléments permettant d'apprécier leur solidité financière et leur capacité à garantir aux usagers et à leurs familles une qualité satisfaisante d'accompagnement et de prestations " et " s'engager à prévoir, soit en interne, soit en partenariat avec les associations implantées dans le Val d'Oise, la continuité de la prise en charge des personnes handicapées " ; que l'article V du même document ajoute que " le dossier de candidature devra comporter (...) [une] note exposant les motifs de l'intérêt à la reprise au regard de son propre projet associatif et décrivant les modalités de sa projection sur le département du Val d'Oise ainsi que les compétences et les qualités fondant à capacité à être repreneur " ; que, ce faisant, les autorités compétentes ont suffisamment défini les éléments au regard desquels les candidatures seraient examinées ; qu'à la date de publication de l'avis d'appel à manifestation d'intérêt, aucun texte ni aucun principe n'imposait à l'administration de préciser les critères de sélection et les modalités de notation ou d'évaluation des projets ; que, dans ces conditions, la Fédération des APAJH n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'appel à candidatures et de sélection organisée par le préfet du Val-d'Oise et le président du conseil général du DEPARTEMENT VAL-D'OISE n'était pas transparente ;
8. Considérant, en troisième lieu, que l'appel à manifestation d'intérêt litigieux imposait seulement aux autorités compétentes d'informer les candidats du rejet de leur candidature sans être tenues d'indiquer les motifs ni l'identité des candidats retenus ; que, par suite, la Fédération des APAJH n'est pas fondée à soutenir que la procédure serait entachée d'irrégularité, motif pris que le préfet et le président du conseil général du Val-d'Oise l'ont seulement informée du rejet de sa candidature mais non des motifs de ce rejet ainsi que de l'identité des candidats retenus ;
9. Considérant, en dernier lieu, que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;
10. Considérant que l'article VI de l'appel à manifestation d'intérêt litigieux prévoit qu'une commission d'examen composée de deux représentants du préfet, de deux représentants du département, du président de l'association Le Colombier et du directeur général de transition est appelée à émettre un avis préalablement à la décision des autorités compétentes ; qu'il est constant que cette commission n'a pas été consultée préalablement à l'adoption de la décision attaquée ; que, toutefois, d'une part, l'association Le Colombier s'est elle-même finalement portée candidate à la reprise des établissements et services médico-sociaux qu'elle gérait et ne pouvait donc pas siéger à ladite commission et, d'autre part, le poste de directeur général de transition de cette association a été supprimé ; que, dans ces circonstances, l'absence de consultation de cette commission, qui ne pouvait plus être réunie dans la composition requise, n'a pas vicié la procédure, ni, en tout état de cause, privé effectivement la Fédération des APAJH d'une garantie et n'a pas influencé le sens de la décision attaquée ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué, le DEPARTEMENT DU VAL D'OISE et le MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE LA SANTE sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé leur décision conjointe en date du 3 juin 2010 ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du DEPARTEMENT VAL-D'OISE et de l'État, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme que la Fédération des APAJH demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la Fédération des APAJH une somme de 2 000 euros à verser au DEPARTEMENT DU VAL-D'OISE sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1005634 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 13 mars 2012 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la Fédération des APAJH devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La fédération des APAJH versera une somme de 2 000 euros au DEPARTEMENT DU VAL-D'OISE sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions du DEPARTEMENT DU VAL-D'OISE tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
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Nos 15VE03156 et 15VE03157