Résumé de la décision
La Cour de cassation a examiné les pourvois de Jérôme X... et de la société "Editions de Minuit" contre un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 12 juin 1962, qui avait condamné X... pour provocation de militaires à la désobéissance. X... a été condamné à une amende de 2000 francs et à la confiscation des livres saisis, tandis que la société a été déclarée civilement responsable. La Cour de cassation a cassé l'arrêt de la Cour d'appel, estimant que celle-ci avait statué sur des faits non compris dans l'acte de poursuite, portant ainsi atteinte aux droits de la défense.
Arguments pertinents
1. Violation des droits de la défense : La Cour de cassation a souligné que le juge correctionnel ne peut statuer sur des faits non compris dans l'acte qui a saisi le tribunal. En se basant sur la "ligne générale" des ouvrages publiés par l'éditeur et sur la préface, la Cour d'appel a introduit des éléments qui n'avaient pas été soumis aux débats, ce qui a constitué une violation des droits de la défense. La Cour a affirmé : "le juge ne peut ajouter à la prévention aucun fait nouveau, non soumis aux débats".
2. Établissement de l'intention coupable : La décision a précisé que l'intention coupable, essentielle pour établir la provocation à la désobéissance, ne peut être prouvée que par des éléments directement liés à la poursuite. La Cour a noté que "les éléments extérieurs au texte ne peuvent suppléer à ce qui ne résulterait pas du texte et qui n'aurait pas été soumis aux débats".
Interprétations et citations légales
1. Code de procédure pénale - Article 388 : Cet article stipule que le juge ne peut se prononcer que sur les faits qui ont été soumis à son appréciation. La Cour de cassation a rappelé ce principe fondamental pour justifier sa décision de cassation.
2. Loi du 29 juillet 1881 - Article 25 : Cet article définit la provocation à la désobéissance et souligne que l'intention coupable doit être prouvée. La Cour a affirmé que "l'intention coupable [...] ne peut cependant être établie que par des éléments extrinsèques ou intrinsèques inhérents à la poursuite elle-même".
3. Loi du 20 avril 1810 - Article 7 : Cet article, qui traite de la responsabilité des éditeurs, a été mentionné dans le cadre de la responsabilité civile de la société. La Cour a précisé que la référence à la "ligne générale" des ouvrages ne suffisait pas à établir l'intention coupable.
En conclusion, la décision de la Cour de cassation a mis en lumière l'importance du respect des droits de la défense et des limites de la saisine du tribunal, tout en clarifiant les exigences de preuve pour établir l'intention coupable dans le cadre de la provocation à la désobéissance.